mercredi 25 janvier 2012

Un nom de conte de fées pour un village de conte de fées

   Je ne sais pas si c'était par inconscience ou par détermination, mais las de la ville et de ses bâtiments gris, nous avons voulu en sortir le temps d'une journée. A bord d'un "elektritchka", sorte de train de banlieue moscovite, qui nous menait à Peredelkino, nous avons vu passer une dizaine de vendeurs de toutes sortes, trainant leur sac rempli à craquer de bricoles en tout genre "Made in China" et déclamant d'une voie monotone une annonce apprise par cœur. Puis une jeune guitariste est passé réchauffer un peu l'atmosphère dans ce wagon où la température devait dépasser celle de dehors de seulement quelques degrés. Après lui avoir donc donné quelques roubles, vidé le contenu de mon thermos de thé et survolé quelques pages de mon magazine de "toilettes" (parfait pour bouquiner sur le trône) selon un ami italien, nous étions déjà arrivé. Ou du moins à la gare de Peredelkino, parce qu’on a très vite compris que les lieux qui nous intéressaient se trouvaient à une grosse demi heure à pied de là. Prenant donc notre courage à deux mains, nous avons mis un pied devant l'autre pour rejoindre la fameuse maison de Pasternak.


   Mes doigts de pied tous engourdis, j'ai visité cette étrange maison où l'auteur a écrit son roman le plus célèbre, Le docteur Jivago. C'est aussi dans une de ses pièces qu'il a quitté notre monde.


   Quittant la chaleur relative de cette maison cossue, nous avons continué notre périple. La prochaine étape devait être la maison de Boulat Okoudjava, mais ne trouvant aucune indication, nous avons préféré nous arrêter pour demander notre chemin. Une maison au bord de la route a attiré mon attention, surement parce qu’on pouvait lire sur sa façade BIBLIOTHEQUE  dans de grandes et belles lettres colorées...


   Comme une petite fille perdue dans la forêt qui tombe nez à nez avec une maison en pain d'épices, j'ouvris donc la porte de cette étrange demeure et une chaleur m'enveloppa immédiatement. Et même si j'étais heureuse de fuir le froid saisissant qui m'avait poursuivi jusqu'au seuil de la porte, je vous parle ici d'un autre genre de chaleur. Une chaleur qui n'obéit à aucune règle météorologique. Une chaleur qui s'immisce encore plus profondément que dans vos mains ou dans vos pieds gelés. Une chaleur qui va même jusqu'à vous faire oublier vos membres torturés. Parce que cette chaleur pénètre d'abord tous vos sens avant d'atteindre votre cœur... 

   Les bibliothèques ont toujours été pour moi des lieux remplis de magie. Cela explique ma joie de pouvoir découvrir cette toute petite bibliothèque isolée dans la forêt. Mais je ne m'attendais tout de même pas à ce qu'elle produise sur moi un effet encore plus magique que d'habitude. Des centaines de livres pour enfants répartis dans six petites pièces, révélant chacune leur part de nostalgie. Des petites poupées dans l'une, un petit pupitre avec son encrier dans l'autre, des costumes d'école d'enfants soviétiques avec leur étoile rouge dans une troisième. Le tout entreposé entre des étagères ployant sous le poids des livres, une armoire vitrée conservant jalousement des livres de conte autographiés, des tableaux en tout genre représentant des scènes fantastiques et des photos en noir et blanc de gamins rieurs. Et à l'instant où je me demandais qui pouvaient bien être ces petites têtes blondes, une dame rondelette et paisible vint s’enquérir de l'objet de notre visite. Oubliant alors complètement notre objectif initial, nous l'avons écouté raconter avec passion l'histoire de cette petite bibliothèque. Conçue il y a 55 ans par Tchoukovskyi, un écrivain pour enfants qui habitait alors la maison voisine, tous ses ouvrages semblent avoir gardé le souvenir des petits chercheurs de rêve qui ont plongé leur nez dedans. 

   Mais quittons à regret cet endroit hors du commun et consolons nous avec la maison musée de Boulat Okoudjava. 


   D'une autre manière, la datcha de ce vieux chanteur m'a aussi envouté. J'ai observé scrupuleusement toutes les traces empreintes de nostalgie que cet homme a laissé avant sa mort. Je n'ai toujours pas percé le mystère de toutes les petites cloches pendues au plafond qu'Okoudjava devait surement collectionnait, mais je me suis fasciné pour tous les cadeaux du chanteur Vladimir Vyssotskyi ou encore de l'écrivaine Anna Akhmadoulina, qu'il conservait précieusement. Dans mon esprit, Boulat Okoudjava est un peu le Brassens de la chanson russe et ces textes sont imprégnés d'un grand amour de son propre pays.

1 commentaire:

  1. Intéressante cette virée à Peredelkino, la ville des écrivains? (je vois que Lili Brik ou Tarkovsky père y ont vécu...)
    C'est juste derrière le MKAD donc vraiment proche. Si tu as l'occasion de passer au MGY ou à Moscow city, envoie des photos. Ca me rappellera le super film "Чёрная Молния"!!! ;)

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